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Un samedi sur deux, on t’emmène à la rencontre d’une nouvelle thématique liée au combat féministe. Cette fois-ci, Marie-Alix interroge Céline Bardet, juriste internationale, présidente et fondatrice de “We Are Not Weapons Of War”, sur le viol comme arme de guerre.
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"C'est une révolution qui n'a pas encore commencé"
Céline Bardet est juriste internationale, spécialisée dans les crimes de guerre. Elle a participé à la condamnation des plus grands criminels de guerre des Balkans, travaille comme experte consultante pour les Nations Unies, l’Union Européenne et Interpol. Elle est aussi présidente et fondatrice de l’association de lutte contre le viol comme arme de guerre We are Not Weapons of War. Une vingtaine de minutes avant l’interview, elle demande par texto : « Rassurez-moi, ce n’est pas pour la télé, si ? Parce que j’ai vraiment une tête fatiguée là ! » En effet, quelques heures plus tôt, elle prenait part à des négociations sur le conflit Libyen. Rencontre.
Vous êtes rentrée en France hier, c’est bien ça ? Où étiez-vous ?
J’étais à Djerba, sous 28°C. Ça peut paraître sympa dit comme ça, mais j’y étais pour un gros travail avec le gouvernement Libyen. C’est un dossier compliqué pour documenter les crimes en Libye. Comme c’est difficile d’aller sur place, les conversations ont eu lieu sur cette île. C’était un travail complexe, mais ça s’est bien passé. J’ai quand même vu les flamands rose arriver de Camargue pour l’hiver, c’était un spectacle magnifique !
Vous avez fondé l’ONG « We are not weapons of war » (WWoW), traduction littérale de « nous ne sommes pas des armes de guerre ». Pouvez-vous expliquer le but de cette ONG, et son évolution depuis sa création ?
Ça fait vingt ans que je travaille sur les crimes de guerre en tant que juriste. Je n’avais pas d’intérêt spécial sur les violences sexuelles dans les conflits à l’époque. Cela a commencé à l’époque où je travaillais sur la Bosnie : même si les viols étaient pléthore dans ce conflit, les victimes témoignaient très peu, il y avait une omerta. Quand j’étais ensuite en Libye en 2010, qu’il y a eu la révolution en 2011, j’ai fait le même constat.
En Bosnie, j’ai croisé la route d’Angelina Jolie qui préparait son film « Au Pays du Sang et du Miel ». Elle co-organisait aussi le premier Sommet global sur le viol dans les conflits à Londres, qui a eu lieu en 2014, auquel elle m’a invitée. Elle vivait en France à ce moment là et m’a dit, « je trouve fou qu’en France on parle si peu du viol comme arme de guerre ». En effet, alors que le Times faisait sa une à ce sujet, pas un mot dans les médias français.
J’ai donc créé WWoW en 2014, dans le but d’aider le judiciaire à mieux comprendre et traiter ces violences. A la base, WWoW était une campagne de sensibilisation. C’est devenu une structure parce que j’ai reçu des dons, et que je ne pouvais pas les mettre sur mon compte en banque ! J’ai donc créé une association loi 1901. C’est devenu la première organisation à vocation globale sur ce sujet dans le monde. Depuis 2016, il y a aussi la fondation Mukwege.
Aujourd’hui, les institutions publiques et les médias s’emparent cependant plus du sujet ?
Oui, on en parle plus, mais pas forcément de la bonne manière. L’intention d’en parler est bonne, mais tout le monde ne peut pas parler de viol comme arme de guerre, ce sujet complexe demande une expertise.
D’une part, ce qui me gêne, c’est la manière dont les victimes sont exposées. Il faut savoir interviewer des victimes, qui ont des traumatismes graves et profonds, ça peut être dangereux. Elles vont être interviewées plusieurs fois, elles-mêmes n’ayant pas forcément conscience de l’impact que cela aura sur leur vie. Parfois, un an après avoir témoigné, une victime veut disparaître d’un documentaire, mais le documentaire est déjà sorti.
C’est un avis personnel, mais je crois qu’il faut faire attention à ne pas réduire le viol comme arme de guerre à du sensationnel. Le côté émotionnel est nécessaire pour que le public comprenne l’enjeu, mais il faut parler de ce qu’il y a derrière l’émotion, il faut creuser pour comprendre de quoi on parle. Donc oui, aujourd’hui on en parle beaucoup, mais on ne voit que très peu de changements.
Vous distinguez plusieurs types de viols dans les conflits.
En effet. L’autre chose qui me gêne, c’est que dans la presse et dans certaines organisations, on tend à tout qualifier de viol comme arme de guerre parce que “ça en jette”, parce que ça touche davantage le public – mais parfois, ça n’en est pas.
Beaucoup d’études qui se recoupent montrent qu’un contexte chaotique, comme un conflit ou une élection chaotique, crée un contexte propice aux violences sexuelles. Dès qu’un système étatique ne fonctionne plus, il y a des viols. En revanche, on distingue les violences sexuelles, les violences sexuelles en zone de guerre, et les violences sexuelles comme arme de guerre.
Le viol en zone de guerre, c’est l’image, mauvaise, qu’on a du « dommage collatéral ». C’est l’exemple du soldat qui arrive dans un village et décide de violer une femme, sans motif, sans ordre. Dans ce cas, le viol n’est pas planifié ni organisé, il se passe dans un contexte où il n’y a ni cadre, ni protection juridique ou structurelle.
Dans le cas du viol comme arme de guerre, le viol est utilisé comme une arme. C’est alors systématique, planifié, ordonné, pensé. Dans l’exemple du Rwanda, le viol était un élément constitutif du génocide des Tutsis qui a eu lieu. Pauline Nyiramasuhuko, ministre de la famille, donnait l’ordre : « avant de les tuer, violez-les ». Dans le cas de Daesh ou de Boko Haram par exemple, il y a des guidelines claires. On a retrouvé des guides écrits par l’Etat Islamique sur les manières de violer les femmes Yézidies, de comment les vendre, aussi. C’est aussi dans ces cas-là qu’on peut retrouver des viols avec des objets, avec des bâtons, des bouteilles, etc.
Il n’y a pas d’échelle de gravité, dans les deux cas, c’est très grave. Les victimes ne font pas la différence – pour elles, un viol est un viol. Dans le cas du viol comme arme de guerre se pose la question du côté systémique du viol. Si dans un village, une personne a été violée, ça n’est pas forcément une arme de guerre. S’il y en a dix, quinze, vingt, ça devient organisé, systématique.
Le viol de guerre concerne-t-il aussi les hommes ?
Il y a beaucoup d’hommes victimes, bien plus qu’on ne le croit. En Libye, c’est un phénomène énorme, en République du Congo aussi. Pour eux, c’est encore plus difficile d’en parler parce que dans leurs esprits, c’est un truc qui arrive à des femmes, pas à eux.
Dans le viol comme arme de guerre, si je comprends bien, se pose aussi la question du but. Certains violent pour terroriser, voire dans un but génocidaire, comme c’était le cas en Bosnie ?
En effet, l’autre différence, c’est l’objectif. Pour le cas du soldat qui arrive dans un village et viole, il n’y a pas d’objectif clair. Son but, c’est la prise de pouvoir et l’humiliation – deux choses qui sont un facteur commun à toutes les violences sexistes et sexuelles, peu importe le contexte, à mes yeux.
Dans le viol comme arme de guerre, il y a un objectif clair. Le but peut être économique, par exemple, de terroriser une population dans le but de la faire se déplacer de terres qui ont une valeur financière. On humilie alors pour détruire. En Afrique Subsaharienne, où la femme représente le foyer, la famille, on va jusqu’à détruire leur vagin.
C’est d’ailleurs comme ça que le gynécologue congolais Denis Mukwege a dédié sa carrière à soigner les femmes victimes de viols et de mutilations sexuelles. À la base, ce qu’il voulait faire n’avait rien à voir avec le viol de guerre, son but était d’aider les femmes à accoucher. Mais il s’est retrouvé face à des personnes qui avaient le vagin détruit, il s’est donc adapté.
L’objectif, aussi, peut-être l’épuration ethnique, comme c’était le cas en Bosnie. C’est, à ma connaissance, le seul conflit où il y avait des camps de viols. Dans ce cas-là, c’était très travaillé. Les Serbes, qui pensaient avoir un sang plus « pur » que les Bosniaques musulmans, violaient les femmes pour leur dire, « tes enfants auront du sang Serbe ». C’était une des techniques de développement idéologique autour de la purification ethnique de la race. Le message était très clair, ça voulait dire : « si vous ne partez pas, on va vous purifier ».
Peut-on qualifier de viol comme arme de guerre dans le génocide Ouïghour ?
Dans le cas des Ouïghours, en effet il y a des stérilisations forcées, les grossesses forcées… Ce sont des éléments constitutifs de crimes internationaux qui figurent dans le Statut de Rome. Il faudrait qu’on travaille davantage ce sujet pour le dire, mais c’est en effet certainement une approche similaire de purification ethnique.
On sait aussi que les violeurs peuvent aussi être des « allié.e.s ». Je pense à Berlin, après la seconde guerre mondiale, au moment de la libération. Entre avril et septembre 1945, les historien.ne.s évoquent 100 000 viols commis à Berlin, et en tout 2 millions d’Allemandes violées par des soldats. On voit bien que le viol n’est pas commis que par des « ennemis ».
C’est une question intéressante. Au Tribunal de Nuremberg, [NDLR : le procès contre 24 des principaux responsables du Troisième Reich, accusés de complot, crimes contre la paix, crimes de guerre et crimes contre l’humanité, du 20 novembre 1945 au 1er octobre 1946], on a parlé de crimes contre l’humanité, mais la question des viols n’a jamais été adressée. C’était le vide complet.
Denis Mukwege pose la question : « qui commet ces viols ? » Si on n’aborde pas ces questions-là, on ne résout rien. Dans ce cas de la libération de Berlin, on le voit, la question n’est pas nécessairement aussi simple que « agresseur.se.s » d’un côté, et « agressé.e.s » de l’autre. On voit que les alliés, qu’ils soient français, américains ou autre, ont violé. C’est la même chose en Algérie au moment de la guerre, où il y a eu beaucoup de viols par les militaires Français.
Quelles sont les difficultés pour ces condamnations ? Le manque de preuves ?
La première difficulté dans le cas du viol comme arme de guerre, c’est de prouver les ordres qui ont été donnés. Dans le cas de Daesh, pour un juriste, c’est du bonheur ! L’ordre est écrit noir sur blanc.
Mais ce n’est pas parce qu’il n’y a pas d’ordre clair que ça n’est pas une arme de guerre. Quand les alliés arrivent dans une ville et violent en masse, par esprit de revanche, l’ordre ne vient pas d’en haut – mais si le chef d’unité sait ce qui se passe sans rien dire, c’est une forme d’ordre non explicite. C’est une forme de “self-organisation”. Si tous tes potes font un truc et que tu les suis, c’est une organisation non écrite, mais factuelle.
Et globalement, il n’existe pas d’étude mondiale sur le viol de guerre. On n’a pas de chiffres.
En France, dans un pays où le système juridique fonctionne, l’Etat est en place et fonctionnel, seul un viol sur cent est condamné. Ça veut dire quoi, pour les viols en zone de guerre, où il n’y a pas d’infrastructure pour juger ?
Il y a quelque chose de commun aux violences sexuelles en général et au viol de guerre. Dans les deux cas, c’est un crime singulier qui demande une réponse singulière. Je ne dis pas que le viol est plus ou moins grave qu’un autre crime. Je dis que c’est un crime spécifique, qui amène un traumatisme spécifique. Le jugement et l’accompagnement vers la reconstruction doivent donc être spécifiques. Pour moi, c’est un débat qui n’existe pas encore, c’est une révolution à avoir qui n’a même pas encore commencé.
La première étape, c’est la prise de conscience, c’est d’arrêter de penser que le viol, « n’est pas si grave ». Notamment dans les guerres, il faut se sortir de cette idée selon laquelle le viol serait un « dommage collatéral ». Il faut aussi amener davantage de femmes aux tables des négociations dans les conflits. Si ça reste entre mecs, ils se disent que ça ne concerne que les femmes et ne s’y intéressent pas. Les violences sexuelles qui arrivent aux hommes, ils ne les évoquent pas, ils ne peuvent pas en parler.
Le deuxième point, c’est sur la question de la preuve. Si la preuve n‘est pas récoltée au moment même, ça devient de la parole contre parole. C’est pareil partout, en zone de paix et de conflit. La question ici est : comment construire un dossier assez solide pour obtenir une condamnation dans le cas des violences sexuelles ? C’est une question singulière à la question des violences sexuelles.
« C’est une révolution qui n’a même pas encore commencé. »
Des juges m’ont dit « je sais que ça s’est passé, mais je n’ai pas assez de preuves ». Il faut arrêter de demander le même niveau d’éléments de preuves matérielles pour un viol que pour les autres crimes. Il faut plus de flexibilité. Par exemple, à mes yeux, il faut que le traumatisme psychologique devienne un élément de preuve. Quand un psychiatre diagnostique un syndrome de stress post-traumatique à une personne, à mes yeux ce n’est pas une preuve en soi, mais c’est un élément corroboratif. Dans mon travail avec les victimes, quand j’apprends qu’une personne est en stress post-traumatique, pour moi c’est un pas en avant vers la compréhension du fait qu’elle a été violée. C’est un élément qui devrait être amené en justice.
A la CPI [NDLR : la Cour Pénale Internationale, une juridiction pénale internationale chargée de juger les personnes accusées de génocide, de crime contre l’humanité, de crime d’agression et de crime de guerre], les juges sont très peu formé.e.s à ces sujets-là. Je me souviens d’un juge qui me disait, « la victime est froide, elle n’a pas d’émotion, elle n’est pas victime ». Il y a un vrai travail à faire pour que les juges comprennent le viol et les syndromes dissociatifs qui en découlent. En France, Muriel Salmona, présidente de l’association « Mémoire Traumatique » fait ce travail autour du syndrome dissociatif, du traumatisme, de la psychiatrie.
Il faut aussi arrêter de demander à la victime de témoigner cinquante fois, arrêter de la faire comparaître en audience devant son bourreau. Ça n’apporte rien et c’est extrêmement difficile pour elle.
D’après vous, donc, il faut rendre visibles des éléments de preuves invisibles à l’œil nu.
Moi-même j’ai été en état de stress post-traumatique à cause de mon travail en 2004. En zoomant sur mon IRM, mon médecin m’a montré mon traumatisme : une petite zone de mon cerveau s’était rétractée. Il m’a dit « c’est comme quand tu t’es cassé la jambe. On va te mettre un plâtre et te réapprendre à marcher ». C’est important, pour la victime, de comprendre qu’elle est malade. C’est déculpabilisant de se dire « ça n’est pas de ma faute, ce n’est pas que je ne suis pas forte, c’est que je suis malade. »
C’est comme pour les journalistes de guerre, comme pour les vétérans – quand tu vois des charniers, tu peux tomber malade. Quand tu as mal à la tête, tu prends un doliprane. Quand tu souffres de stress post-traumatique, il faut aussi te soigner.
En France, on est en retard là-dessus. C’est aussi ça qui fait que la victime peut rester vingt ou trente ans en état de stress post-traumatique. Il n’y a pas de prise en charge adaptée. Les anglo-saxons sont beaucoup plus avancés que nous à ce niveau-là. Ils utilisent même la réalité virtuelle pour le soigner. Ces outils sont géniaux ! Aux USA c’est l’armée qui les a développés, en voyant l’énorme taux de suicide chez les vétérans. Ces travaux peuvent être très utiles pour les cas de viol, car ils abordent en profondeur la question du traumatisme. On a besoin de faire de la recherche là-dessus, de transposer ces connaissances. Pour ça, on a besoin de fonds.
En attendant une réforme profonde de la justice, avec WWoW, vous avez décidé de répondre au problème du constant manque de preuves dans les jugements en développant un nouvel outil numérique qui facilite la récolte de preuves.
On a développé Back Up, pour recueillir tout de suite la parole de la victime et les éléments de preuve. Ça se présente comme une app, c’est un site web sécurisé qui permet de récolter un témoignage. Ça ressemble à un questionnaire judiciaire. On peut y uploader des photos ou des vidéos de blessures. On reçoit les éléments en temps réel sur un cloud sécurisé. On stocke les informations pour les victimes, ça leur permet de ne plus les avoir sur leur téléphone. En Libye par exemple, dans un climat ultra sécuritaire, elles ne peuvent pas garder de preuves sur leur téléphone, c’est trop risqué.
Back Up permet aussi d’aller chercher des victimes qu’on n’entend jamais – car c’est une minorité de victimes qu’on entend. La plupart, on ne sait pas où elles sont, ce qui est aussi un des problèmes de la justice. Cet outil permet donc de localiser les violences. Les éléments peuvent être envoyés par la victime elle-même, par une personne qui est avec la victime, ou par un.e tiers.e qui informerait sur une situation en tant que personne extérieure.
« Quand tu as mal à la tête, tu prends un doliprane.
Quand tu souffres de stress post-traumatique, il faut aussi te soigner. »
Quand on les reçoit on utilise la blockchain pour stocker et analyser les informations. Les informations arrivent, le dossier est créé ; une fois que les infos sont dans la blockchain elles ne peuvent plus être modifiées. Ce qui fait que, deux ans plus tard, si la CPI nous demande des informations sur le Burundi par exemple, les infos ressortent telles quelles.
Cet outil a été développé avec les victimes, elles ont apporté beaucoup de choses auxquelles on n’avait pas pensé. Sur le site, il y a aussi un mannequin, elles cliquent sur la zone où elles ont mal. Elles indiquent les douleurs physiques, ce qu’elles ont ajouté, ce sont les « blessure invisibles ». Par exemple, elles appuient sur la tête du mannequin, ou sur l’intérieur du vagin, pour signaler des douleurs, qu’elles soient physiques ou psychologiques. Aussi, je n’y avais jamais pensé, mais des victimes m’ont dit : « quand je suis sur le Back Up, j’existe ». Dans cet espace, les violences qu’elles ont subies existent, sont reconnues.
Quand est-ce que ce site verra le jour, et comment le rendre accessible aux zones les plus reculées ?
Back Up est quasiment fini, il sera lancé fin 2021 ou début 2022. Contrairement à ce qu’on pense, beaucoup de gens ont accès au téléphone portable. Mais on va aussi distribuer des tablettes dans certaines zones. On peut remplir le formulaire offline et l’envoyer après, de manière à n’avoir besoin que d’un tout petit peu de connexion internet pour envoyer son signalement.
Back Up existe dans toutes les langues, il y a aussi une manière de signaler en se servant des pictogrammes pour les personnes analphabètes, ou de répondre en enregistrant un vocal. Le vocal complexifie l’analyse des informations ensuite, mais il est nécessaire pour certains témoignages.
On va former des communautés à utiliser cet outil, il y aura un travail de diffusion. On l’a aussi développé en marque blanche, pour que d’autres puissent l’utiliser. Des associations veulent utiliser ce système pour documenter le parcours des migrant.e.s. On a eu des demandes aussi, de femmes Afghanes, qui voudraient le même système pour faire remonter des infos sur leurs conditions de vie depuis la prise de pouvoir des talibans. C’est une super idée ! Ce système peut servir à plein de choses.
On a fait une première version pilote, en Libye, une zone très complexe, puis une deuxième d’un mois en Afrique de l’Est, au Burundi, en Ouganda, en République du Congo. On a reçu 600 à 700 témoignages en un mois pour le pilote, ce qui montre le potentiel de diffusion. On ne sait évidemment pas encore combien de personnes vont s’en servir. Mais sur le terrain en tout cas, tout le monde en parle. Sur le long terme, cet outil peut aussi nous donner une idée précise du viol de guerre. Répondre aux questions de ce qui se passe, et où.